Sanguelia, Level 1 : De la tête au papier

La bande originale de Sanguelia

Voici le premier article du blog de développement d’un jeu débuté en novembre 2013, alors que je ne disposais pas encore d’un blog personnel. J’ai toutefois pris des notes en me disant que communiquer sur ce projet pourrait m’aider à conserver ma motivation intacte par la suite.

Sanguelia est loin d’être le premier jeu vidéo que j’ai conçu avec un logiciel de création comme ClickTeam Fusion. Dans les années 90, à l’époque où il s’appelait encore Klik & Play, j’ai même fait des dizaines de jeux dans des genres très différents, mais je n’en ai achevé aucun ; si un niveau était jouable, c’était déjà pas mal. Il faut dire que j’étais assez ambitieux et plutôt que de créer des casse-briques, le genre le plus accessible avec ce genre de soft, je préférais me lancer dans des jeux de baston par exemple. Il y avait en plus une émulation mutuelle avec mon grand frère qui, tout en étant moins prolifique, a tenté des trucs aussi dingues qu’un WipEout à deux en écran splitté – mais vu du dessus. Par la suite, j’ai manqué de temps pour m’y adonner jusqu’à la fin de mes études d’ingénieur en informatique. Quand j’ai voulu entrer dans le monde du jeu vidéo – en pleine crise du secteur en 2002 – j’ai plutôt fait des essais avec Div Games Studio, un logiciel plus technique. Il faut dire que ne sachant pas que la ClickTeam avait fait évoluer son outil entre-temps, j’étais resté avec une certaine frustration des limitations de Klik & Play : pas de scrolling, pas de variable globale en dehors des vies et du score – ce qui obligeait à créer d’autres joueurs bidons, etc.

C’est pendant mes études d’audiovisuel, si mes souvenirs sont bons, que j’ai découvert The Games Factory 2. Fort de mes connaissances en programmation, j’arrivais mieux à concrétiser mes idées, et j’étais évidemment moins dispersé et plus raisonnable que par le passé. Du coup, je commençais en général par créer des documents de design sous Word, histoire de voir si j’arrivais à développer des concepts. Certains s’avéraient d’ailleurs trop ambitieux, graphiquement ou en terme de gameplay, pour être réalisés avec un logiciel grand public. C’est aussi à cette période que j’ai commencé à appliquer les préceptes de Miyamoto : partir de mécaniques de jeux et bâtir l’univers autour. Cela m’a d’ailleurs permis de concevoir plusieurs projets que je n’ai pas forcément cherché à concrétiser pour autant. Il faut dire qu’en général, deux choses peuvent me faire abandonner la création d’un jeu : la programmation ou la réalisation. Le premier cas est devenu heureusement plus rare ces derniers temps, mais il m’est arrivé de nombreuses fois de jeter l’éponge parce que je n’arrivais tout simplement pas à faire marcher un jeu comme je le souhaitais, que ce soit à cause d’un bug ou parce que j’avais atteint – du moins j’en avais l’impression – les limites du logiciel.

Maldita Castilla

Maldita Castilla : les jeux de Locomalito sont un exemple parfait de graphismes si équilibrés qu’ils n’ont pas besoin d’être meilleurs

Le second cas, encore très récurrent hélas, c’est que même si je me débrouille pas trop mal en pixelart, surtout avec peu de couleurs et de petits sprites, la partie graphique représente encore beaucoup trop de travail avec ce type de logiciel. Alors certes, on peut très bien faire une démo jouable avec des carrés et des triangles – j’ai même créé un jeu de baston dont les combattants étaient composés de formes géométriques en volume – mais la motivation à poursuivre un travail de longue haleine comme celui-là tient pour beaucoup à la satisfaction de voir des résultats qui, sans être définitifs, ont un minimum de gueule. Cela dépend aussi du genre abordé : un shoot ‘em up ou un casse-briques peuvent être très fun avec des graphismes très simples, mais pour un jeu de plateforme ou d’aventure, où il y a une part d’ambiance et où le feeling passe aussi par l’animation, c’est plus compliqué… Ces dernières années, Locomalito est clairement celui qui m’a refilé le virus. C’est vraiment difficile de jouer à ses jeux sans avoir envie d’en créer soi-même. Surtout que certaines de ses créations arborent des graphismes qui semblent à ma portée – pas Maldita Castilla, hein ?

Dans un premier temps, je lui ai même proposé une collaboration pour ne pas avoir la frustration d’un résultat décevant, mais il était hélas trop occupé par ses nombreux projets personnels… Janvier 2013 s’étant montré très calme côté Mag, je me suis ensuite lancé dans un titre très ambitieux, que je nommerai 3E87 pour simplifier. Très varié par nature, il me garantissait de ne pas me lasser rapidement, mais hélas, il me garantissait aussi une cinquantaine de niveaux à créer pour être complet ! J’ai tout de même achevé un niveau (hormis les bruitages et les décors de fond) mais, si je me suis arrêté là, c’est surtout avec la reprise du travail… Déjà à l’époque, j’avais l’idée d’un jeu situé dans l’univers des films de Lucio Fulci. C’est sans doute La-Mulana, dans un contexte d’une tendance aux jeux de plateformes avec morts violentes (Spelunky et Cie), qui m’a donné envie de créer un jeu d’aventure bien gore. Hélas, en grand fan de Metal Slug et donc de ses momies, ses vers qui grouillent sur le sol et ses zombis, j’avais forcément un jeu hyper bluffant visuellement en tête, et donc totalement hors de portée. Mais quelques mois plus tard, rejouer à Donkey Kong Country Returns, que j’avais adoré sur Wii et dont j’ai eu la version 3DS gratuitement, a ravivé la flamme.

La-Mulana

J’avais été aussi agréablement surpris par le pourtant décrié Yoshi’s Island 2 sur DS, parce que je n’imaginais pas que le jeu serait autant porté sur l’exploration, avec pas mal d’objets à trouver mais sans les excès des derniers jeux Rare sur Nintendo 64. Surtout que les objets (fleur, étoile, pièce) ne sont pas aussi interchangeables. Néanmoins le jeu avait ses frustrations et j’ai ensuite été très déçu par l’original que je n’ai jamais fini dans sa version GBA. Or dans le jeu de Retro Studios, on retrouve ce level design ultra dense comme je les aime. Parce que je déteste trouver une zone un peu planquée mais qui ne recèle rien par exemple, et dans DKCR les différents objets sont aussi très spécifiques – j’y reviendrai en détail dans le prochain article. Hélas, je savais d’expérience que The Games Factory 2 n’est pas idéal pour les jeux de plateformes. Quel que soit le réglage de la puissance et de la gravité, le personnage semble toujours sauter plus haut que loin. Beaucoup de développeurs contournent alors le problème en programmant manuellement les sauts, mais je ne me sens pas capable d’obtenir un résultat satisfaisant, d’autant que je trouve rarement la physique de sauts réussie dans les jeux de plateformes – en dehors de ceux développés par Nintendo. En plus, je doutais réellement qu’il soit possible d’implémenter le rebond sur les ennemis…

Quand les idées s’accumulent, il faut que je les écrive quelque part pour me soulager l’esprit. Mais cette fois, je n’ai pas rédigé de document de design sous Word. Il se trouve que pour 3E87, une de mes superstitions pour me motiver était d’avoir un carnet à petits carreaux comme Locomalito. Car même si c’est parfois laborieux d’écrire en toutes lettres, c’est bien plus facile pour faire des croquis – Word permet le dessin, mais c’est loin d’être pensé pour ! Les petits carreaux permettent aussi de coucher rapidement son level design sur le papier, surtout que l’éditeur de scène de TGF2 utilise une grille pour caler les objets. De toute façon, même quand je créais un document sous Word, j’étais bien obligé de noircir des post-it pour noter des coordonnées d’objets, lister des choses à penser, etc. J’ai donc commencé à prendre des notes, à « réfléchir à voix haute », enfin à écrire tout ce qui me passait par la tête. Cela m’a permis d’emblée de déceler de nombreux problèmes de design, et de prendre tout de suite des décisions importantes sur lesquelles il serait impossible de revenir !

À bientôt pour le Level 2 intitulé « En dépit de la logique » !

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