Fantômas Isolation : dans ton casier, personne ne t’entendra soupirer

Convaincu qu'il ne finirait jamais le jeu, Régis a préféré mettre fin à ses jours...

Convaincu qu’il ne finirait jamais le jeu, Régis a préféré mettre fin à ses jours…

Il y a environ dix ans, inspiré par l’exploration solitaire d’un Metroid Prime et par la tension d’un Resident Evil 4, j’avais envisagé un survival horror plus « contemplatif » dans l’univers d’Alien. On aurait avant tout visité seul un immense vaisseau délabré, et on aurait surtout cherché à trouver le moyen de partir avant même de survivre au(x) xénomorphe(s), dont les rencontres auraient été peu nombreuses mais éprouvantes. Cela remonte à loin, mais je crois que je m’étais demandé comment faire durer l’aventure sans que le joueur s’ennuie. Exploiter son appréhension est une arme puissante ; un joueur qui a peur que le sol s’effondre à tout moment (Alone in the Dark) ou que des chiens jaillissent des fenêtres (Resident Evil) agira tout le temps avec prudence, gonflant malgré lui la durée de vie. Face à un ennemi, il paniquera et pourra mourir bêtement ou le vaincre après avoir gâché des munitions, lui donnant envie de reprendre sa sauvegarde. Mais c’est aussi une arme à double tranchant, puisqu’un joueur téméraire ou qui a déjà fini l’aventure foncera tête baissée, découvrant souvent au passage le côté scolaire d’un level design qui le force à faire des allers-retours. D’ailleurs, les New Game + de Resident Evil misent souvent sur le speedrun.

Quand Alien Isolation a été annoncé, mon excitation a été fortement teintée de scepticisme. Les previews, plutôt positives, appuyaient sur la présence d’un unique xénomorphe, qui vit sa vie mais vient souvent pourrir la vôtre. Étant très critique du gameplay dit « émergent » dans lequel le level design est souvent sacrifié sur l’autel de l’IA et du moteur physique, je me demandais dans quelle mesure la difficulté n’allait pas être totalement aléatoire, entre une partie où l’on rencontrerait sans arrêt l’Alien et une où par chance il serait toujours de l’autre côté de la zone… Et puis les journalistes qui s’y étaient essayés présentaient un jeu si terrifiant que je me demandais aussi comment le joueur pourrait tenir une dizaine d’heures sans craquer ! Comment The Creative Assembly était parvenu à maintenir la pression durant toute l’aventure tout en ménageant des pauses ? Comment conserver un minimum de tension durant ces séquences de relâche si le joueur sait qu’il n’est plus en danger ? Quand les tests sont tombés, la durée de vie annoncée dépassait les vingt heures ! Pour un survival horror ?! Mais est-ce dix heures allongées par l’appréhension, ou vingt-cinq heures bien remplies ? Comment The Creative Assembly a-t-il réussi cet exploit ? Comment a-t-il fait ?

Ah, te voilà enfin, Alien !

Ah, te voilà enfin, Alien ! Tu n’es pas si effrayant finalement !

Eh bien, il ne l’a pas fait ! Soyons clairs ; le jeu ne manque pas de qualités et peut-être qu’au fond, cette équation était réellement impossible à résoudre. Et c’est même peut-être parce qu’il est très réussi sur certains aspects, exceptionnel même sur l’ambiance par exemple, que la déception n’en est que plus grande. Beaucoup trop long, le jeu manque surtout du bon dosage, même si c’est sans doute ce qui est le plus difficile à réussir. Le level design multiplie parfois les possibilités quand c’est inutile, se montre tantôt chiche en sauvegardes, et tantôt généreux dans des zones sans danger. L’apparition du xénomorphe est très progressive, et très bien construite, mais une fois qu’il est là, il devient omniprésent, parfois même plus pénible que réellement effrayant. Du coup, les développeurs ont bien compris qu’ils ne pouvaient pas nous le coller dans les pattes pendant une vingtaine d’heures, et ils ont dû trouver des « remplaçants », des répliquants si j’ose dire. Même certains humains vous tirent dessus, souvent sans raison d’ailleurs. Cela nous rend même inutilement paranos ; on n’ose plus s’approcher de certains alliés de peur qu’ils nous tirent eux aussi dessus ! La sauvegarde indique aussi parfois « ennemi(s) proche(s) » à côté d’une femme sans défense.

Dans l’univers d’Alien, il y a aussi les androïdes qui se révèlent dangereux, du moins dans le premier film dont s’inspire principalement le jeu. Mais le studio a peut-être estimé qu’il serait difficile de les différencier des humains – c’est un peu l’idée ! – et qu’ils ne seraient pas assez effrayants. Alors il a inventé… les Lambda. À la décharge de The Creative Assembly, je pense qu’ils n’ont jamais vu les films Fantômas avec Louis de Funès mais bon sang, la ressemblance est troublante ! Avant même les premières « vraies » confrontations avec le xénomorphe, on jouera donc plutôt au chat et à la souris avec Jean Marais, et à la moité du jeu, après un twist qui nous laisse croire qu’on s’est débarrassé de l’Alien – si je vous spoile c’est que vous êtes bien naïf – on s’en tape encore un bon paquet avant de revoir du Giger. Et par certains aspects, ces androïdes sont bien plus pénibles car silencieux dans leurs déplacements, et quand on les entend nous adresser la parole, c’est souvent trop tard. Au moins, quand l’Alien nous repère, c’est fichu puisqu’on ne peut pas le tuer. Les Lambda, eux, reposent sans cesse le même dilemme. Dois-je sacrifier mes précieuses munitions ou les semer, ce qui est parfois une bonne solution dans la mesure où ils ne courent jamais.

Jean Marais

Ça, c’est pour le Commissaire Juve !

S’ils nous repèrent de loin, on peut même s’en tirer en marchant – si l’on veut éviter d’attirer l’attention de l’autre relou en courant – à condition de bien savoir où l’on va, ou en se dirigeant vers un conduit ou un ascenseur inaccessible à eux. L’affrontement sera plus délicat, parce que ces androïdes bloquent systématiquement – et de manière très énervante – vos coups de cric, à moins de les avoir immobilisés. Pour cela, on a le choix cornélien entre un taser, efficace mais au nombre d’utilisations limitées et dont les « munitions » sont extrêmement rares, et une bombe IEM. Cette dernière présente l’avantage de pouvoir se fabriquer, mais c’est clairement l’objet qui demande le plus de ressources. On se retrouvera souvent dans une situation où il ne manque, par exemple, qu’un détecteur pour le fabriquer alors qu’on croule sous plein d’autres composants dont on a déjà le maximum autorisé… En plus, on ne peut pas en porter plus de trois à la fois ! Heureusement, une bombe peut toucher plusieurs Lambda simultanément, mais ceux-ci ne se déplacent pas toujours en groupe, et il faudra manier du cric rapidement pour tous les achever avant qu’ils ne se réveillent. Et puis le lance-flammes est aussi efficace, mais mieux vaut le garder pour autre chose…

Et comme si ça ne suffisait pas, le jeu nous fait le coup de la confiscation des armes juste avant le passage où on en rencontre le plus ! Et c’est aussi le moment où l’on découvre un nouveau type de Lambda encore plus terrifiant, d’autant qu’il est extrêmement ridicule : l’androïde en ciré jaune. Cette combinaison antistatique les protège du taser et de l’IEM, ne nous laissant que l’utilisation des armes à f… Ah ben non, c’est vrai qu’on ne les a plus… Que reste-t-il ? Des cocktails Molotov qui leur font des dégâts mais qui ne ralentissent pas leur marche, et surtout les pipe bombs (bombe tuyau en véeffe). Mais il en faut deux pour tuer un Lambda à capuche, et je rappelle qu’on ne peut en porter que trois à la fois maximum. Heureusement, elles sont assez faciles à fabriquer, et je dois dire que j’ai pris un sacré plaisir à un moment donné à éliminer quatre de ces connards simultanément avec deux bombes bien placées. Parce qu’à force de nous suivre en marchant, ils ont tendance à s’agglutiner si on les ralentit en franchissant des portes. Le jeu fournit aussi très tardivement une nouvelle arme supposée idéale pour eux, mais la première fois que j’ai compris comment tirer avec, elle s’est enrayée par surprise et m’a même trollé avec le succès correspondant…

L'ennemi le plus redoutable

L’ennemi le plus redoutable de l’Histoire des jeux vidéo est enfin mort

Il faut en plus préciser que les armes sont relativement pénibles à utiliser. Pour le coup, on est dans la grande tradition du survival horror avec des munitions rares pour commencer, d’autant plus que vous aurez tendance à trop les économiser « au cas où ». J’ai finalement très peu utilisé mes armes à feu par exemple, les trouvant peu efficaces contre les Lambda et les réservant plutôt aux humains… que j’ai finalement évité au maximum d’éliminer moi-même. Mais le plus horrible est indéniablement le changement d’arme, même si l’on dispose heureusement d’un raccourci avec les flèches gauche et droite de la croix directionnelle – qui ne fonctionne pas pour les items craftés cependant. Il faudra donc maintenir un bouton qui ralentit l’action sans la mettre en pause puis sélectionner son arme ou objet en mettant la bonne direction avec le stick analogique, ce qui est horriblement imprécis quand le stick n’a pas de base octogonale comme les manettes Nintendo de la Nintendo 64 à la Wii. Mais on va dire que ce désagrément « simule » l’état de panique et, dans le genre des désagréments volontaires, toutes les armes doivent être rechargées, taser compris ! Et pour le pistolet il faut bien maintenir le bouton pour recharger les six balles une par une…

Mais bon, rassurez-vous, il y a quand même un Alien dans le jeu, et vous regretterez parfois d’ailleurs qu’il soit là, même si ça vous change de Fantômas… Le jeu joue bien évidemment sur l’appréhension de la première rencontre, et la ménage efficacement. Vous vous en voudrez sûrement d’avoir perdu énormément de temps durant les premières heures à avancer prudemment, sans courir et en sauvegardant sans arrêt alors qu’il n’y a aucun danger. Il y a tout d’abord quelques apparitions scriptées, et même si des légendes disent que le xénomorphe peut venir vous tuer si vous traînez de trop, je n’y crois qu’à moitié. C’est surtout une fois arrivé dans la zone médicale que l’on passe très clairement en mode infiltration. Ce qu’il faut savoir, c’est que bien qu’il n’ait pas d’yeux, l’Alien voit dans le jeu. Si vous vous tenez immobile accroupi dans une alcôve éclairée, vous êtes mort. En revanche, s’il fait sombre, il peut passer juste à côté de vous plusieurs fois, mais ça dépend aussi du niveau de difficulté à ce qu’il paraît. Et croyez-moi, ça va arriver souvent. Dans ces séquences de cache-cache, le gameplay n’est pas si émergent et l’Alien a même une fâcheuse tendance à rôder uniquement dans le coin où vous vous trouvez. Et le level design ne vous aide pas vraiment…

Surtout, ne pas péter !

Surtout, ne pas péter !

Bien entendu, on trouve pas mal de casiers pour se cacher, mais le level designer adore les zones circulaires (ou rectangulaires), c’est-à-dire des couloirs qui forment une boucle. Sauf que la boucle est toujours fermée par une porte bloquée ou une fuite de gaz qui explose quand on s’approche. Du coup, si l’on aperçoit au loin le xénomorphe venir dans notre direction, on ne peut pas faire demi-tour en espérant le contourner ; il n’y a souvent qu’un seul chemin possible… De nombreuses fois, je me suis retrouvé littéralement bloqué dans un bureau, caché pendant plusieurs minutes dans un casier en sortant de temps à autre mon détecteur, mais brièvement pour ne pas l’attirer s’il était en train de s’éloigner. Et puis, au bout d’une attente interminable, je ne l’entends plus, je sors de ma cachette, je ressors mon détecteur au cas où et… Merde, il est en train de revenir. Je retourne dans mon placard. Si Alien Isolation était une métaphore de la difficulté à faire son coming out dans le monde d’aujourd’hui, ce serait un chef d’œuvre. En plus, c’est durant ces phases déjà très éprouvantes que j’ai découvert un nouvel élément de gameplay ; quand l’Alien entre dans la pièce où vous vous cachez, il arrive parfois qu’il s’approche plus que d’habitude de votre casier.

Et c’est à ce moment-là qu’apparaît un texte vous expliquant de maintenir un bouton pour ralentir votre respiration et éviter d’être repéré. Je crois qu’il s’agit de la gâchette gauche, mais je n’en suis pas sûr car on meurt forcément avant d’avoir lu la phrase… Bien évidemment, ces séquences n’ont pas à être reposantes, mais si l’Alien revenait moins souvent à la charge, ses apparitions seraient sans doute plus effrayantes. Mais là, ça en devient tellement interminable qu’on s’habitue au xénomorphe, et qu’on finit par le trouver juste casse-couilles. Ayant oublié qu’on pouvait donner des coups de cric – j’avais peur d’utiliser l’arme équipée en appuyant sur la gâchette droite – j’avais vraiment envie de pouvoir lui donner des coups de poing, juste histoire de me défouler quand je sais qu’il va encore me tuer. Heureusement, il n’est pas sur votre dos pendant toute l’aventure, et même quand il n’y a pas d’autres ennemis, il peut être « à moitié » présent. Je pense en particulier à une salle dans laquelle il refuse d’entrer, mais se placera toujours au-dessus du conduit le plus proche – sa bave le trahit – pour vous tuer si vous passez en dessous, Game & Watchstyle. Et parfois il n’est pas là du tout, mais les développeurs veulent que vous pensiez le contraire !

Contrairement à l'image précédente, là il a fini par me voir !

Contrairement à l’image précédente, là il a fini par me voir !

Juste après la première grosse séquence de cache-cache, il ne semble pas réellement présent dans la mission 7. Certes, il fait un petit cameo scripté pour croquer quelques messieurs que vous vous êtes galérés à éviter, et si vous lui foncez dessus à ce moment-là, il y a de fortes chances qu’il ait la déontologie de vous tuer. Mais j’ai fait de nombreux allers-retours et je pense que s’il pouvait se montrer, il l’aurait fait ! En un sens, tant mieux parce que cette zone ne contient quasiment pas de cachette, mais bizarrement les sauvegardes y sont plus répandues que d’habitude. Et puis bien entendu, vous entendez l’Alien dans les conduits pile au-dessus de votre tête pendant toute la mission, histoire de maintenir la pression. Il vous suit tellement à la trace que ça en devient ironique qu’il ne soit pas capable de conclure… Tant pis pour lui ! Après, il doit être possible de déclencher son apparition en faisant du bruit – mais pourquoi en ferait-on ? – et surtout en courant, histoire de nous empêcher de torcher cette mission qui consiste, comme la plupart d’entre elles, à actionner une série d’interrupteurs. Au moins, The Creative Assembly s’est montré très créatif dans la variété de systèmes avec lesquels interagir, avec même plein de mini-jeux plus ou moins rigolos…

Certains sont si faciles qu’il en deviennent un peu inutiles, mais d’autres sont assez intéressants – j’adore le piratage au syntoniseur – et ont surtout beaucoup de charme du fait du look Minitel de toutes les interfaces. Comme je le disais précédemment, l’ambiance est le gros point fort du titre et sur le plan des productions values comme disent les Ricains, il est irréprochable. C’est un peu normal de la part d’un studio qui développe avant tout sur PC, mais contrairement à pas mal de jeux récents, il me donne vraiment l’impression d’avoir une machine encore dans le coup. Bon, j’ai quand même eu droit à quelques bugs graphiques, en particulier des Lambda qui aiment bien laisser traîner leurs calculettes dans les airs… J’ai davantage rencontré de difficultés vis-à-vis de bugs de script, mais rien de vraiment grave. Bien sûr, les environnements sont plutôt étriqués et le jeu n’a pas à afficher une ville entière en open world, mais les décors sont incroyablement détaillés. On retrouve plein de petits détails du premier film, comme les échauffements des androïdes, et de manière générale sa direction artistique, ce qui est d’autant mieux que ça a toujours été le point fort de Ridley Scott, ancien décorateur. Il ne manque probablement que les effets stroboscopiques !

Y a pas à dire, les décors sont sublimes !

Y a pas à dire, les décors sont sublimes !

Il faut dire que dans le film, le réalisateur avait abusé de cet effet pour rendre les mouvements de l’Alien moins lisibles, et donc éviter de trahir le fait qu’il s’agit d’un gars dans un costume. Ici c’est évidemment moins nécessaire, et même si on a déjà vu des xénomorphes bien modélisés et animés dans de précédents jeux, même pas très bons, Alien Isolation est sans aucun doute celui qui retranscrit le mieux sa présence sur le plan sonore. Au cinéma, où tout le monde vous entendra crier, on a tendance à tricher et à rendre les monstres (ou les zombis) silencieux quand cela nous arrange, c’est-à-dire quand on veut qu’ils s’approchent d’une future victime sans que le spectateur ne voit (trop) le truc venir. Dans un jeu vidéo, user de ce stratagème, en particulier dans un jeu d’infiltration, le rendrait injouable. C’est d’ailleurs comme ça qu’on identifie les séquences où l’Alien peut réellement se promener dans la zone et vous tuer, parce qu’il fait énormément de bruit en se déplaçant. Mais cela est parfaitement cohérent ; le son qu’il produit correspond incroyablement bien à sa masse et à sa vitesse de déplacement. Lorsqu’il fonce vers un conduit d’aération, il fait un sacré vacarme bien commode pour vous indiquer qu’il quitte la zone où vous vous trouvez.

Le seul souci est qu’on l’entend si bien à travers les cloisons que l’on peut parfois surestimer sa proximité, et rester inutilement planqué dans son casier… De manière générale, le sound design est excellent, comme souvent dans les jeux vidéo basés sur des films de science-fiction ; on a toujours la garantie de s’y croire un minimum dans un jeu Star Wars, par exemple, grâce aux musiques de John Williams et aux bruitages « canoniques ». Ici aussi, l’ambiance doit beaucoup aux compositions de Jerry Goldsmith, et les quelques pistes originales sont moins convaincantes, ayant surtout tendance à saturer l’espace sonore et vous empêcher de guetter le moindre bruit. Y a même un thème vers la fin où les compositeurs ont trouvé spirituel d’intégrer des sons de xénomorphes. Les petits cons. C’est d’autant plus inutile que les portes se referment déjà – derrière vous en général – en faisant la même respiration que la bête… Tous les bruitages sonnent délicieusement seventies, des ordinateurs à affichage monochrome aux caméras projetant une lumière striée du plus bel effet – et bien pratique pour identifier leurs champs d’action. Et je donnerai encore plein d’autres exemples croustillants si trois paragraphes de compliments, ce n’était pas déjà beaucoup !

J'ai pas dit que t'étais gros

J’ai pas dit que t’étais gros, j’ai dit que t’avais une « certaine masse » !

Parce qu’il y a bien entendu plein de petits défauts horripilants, dont certains le sont d’autant plus qu’ils pourraient être patchés en quelques minutes. Déjà, Alien Isolation commet au moins deux des péchés du jeu vidéo moderne : 1) l’impossibilité de passer les crédits, fort jolis il est vrai en dehors de l’animation AMD qu’on a vu cent mille fois, et 2) le fait que « continuer la partie » soit en dessous de « nouvelle partie », qui s’appelle d’ailleurs « commencer à jouer » histoire de tromper l’imprudent… En jeu, le plus pénible est l’interaction contextuelle qui parfois ne s’affiche pas alors qu’on est clairement en face de l’objet. Vous voyez le cadavre tout en haut de cet article ? J’ai bien cru qu’on ne pouvait pas le fouiller alors qu’il faut juste se positionner à un micron près, ou bouger tout le temps et mitrailler le bouton pour faire l’interaction à la volée ! Quand vous êtes poursuivi par un Lambda, que vous voulez vous jeter dans un conduit pour lui échapper et que l’invite ne s’affiche pas… Parfois aussi, il est arrivé que le passage par certaines portes se fassent mal, et Amanda Ripley est incapable d’escalader une marche s’il n’y a pas un véritable escalier. Et puisque l’on parle de portes et de conduits, ils s’ouvrent automatiquement lorsque l’on s’approche…

Ce n’est pas une mauvaise chose en soi, mais certaines portes sont munies de détecteurs ultrasensibles et s’ouvrent même si vous rasez le mur opposé, vous mettant parfois face à face avec un ennemi ! Bien entendu, on passera rapidement sur les sauvegardes dont la répartition est très inégale. Après tout, un survival horror n’est pas fait pour être confortable, et le genre est précisément caractérisé (et apprécié) par la présence volontaire d’erreurs de gameplay pour stresser le joueur, l’induire en erreur, etc. Mais tout est une question de dosage encore une fois. Alien Isolation sait surprendre avec des éléments de gameplay émergent, c’est indéniable, comme cette fois où, quasiment à la fin du jeu, j’ai croisé le xénomorphe dans un conduit d’aération alors que j’étais persuadé depuis le début qu’il ne pouvait pas emprunter les mêmes que le joueur. Je suis mort et à ma tentative suivante, je ne l’ai pas revu ! C’est là l’inconvénient de ce système ; j’aurais pu passer complètement à côté. Mais le jeu comporte énormément de scripts par ailleurs, et ménage même des séquences entières « sur rails » dans un esprit proche de Dear Esther, comme lors du flashback jouable. On n’est pas loin du film interactif, si ce n’est qu’il n’avance qu’au rythme du joueur.

[SPOILER] Rassurez-vous, l'Alien revient à la toute fin du jeu ! [/SPOILER]

[SPOILER] Rassurez-vous, l’Alien revient à la toute fin du jeu ! [/SPOILER]

Et ces passages contemplatifs sont plaisants par le soin du détail apporté aux environnements et aux interactions possibles. C’est même dommage quand il suffit d’appuyer sur un bouton de la manette pour activer un interrupteur… En tout cas, pour ménager des pauses entre deux moments de tension, je préfère ces séquences parfois très Gravity à celles où les développeurs pensent nous dépayser avec des androïdes. Ironiquement, à la toute fin, The Creative Assembly a quasiment renié son design avec une longue séquence sans sauvegarde mais truffée de checkpoints, quasi inexistants dans le reste de l’aventure, et surtout presque entièrement composée de scripts parfois abusifs – le danger qui attend sagement que tu arrives à l’endroit voulu pour surgir « par hasard ». Et la scène finale est un Quick Time Event absolument ridicule qui donne l’impression de jouer à Dance Dance Revolution au ralenti… Bien sûr, si on nous imposait du cache-cache avec l’Alien pendant plus de vingt heures, ce serait insupportable. Au cinéma, certaines idées fonctionnent mieux en court-métrage mais dans le jeu vidéo AAA, on n’ose hélas pas faire court… À part dans les deux DLC qui recréent deux séquences du film de 1979, et qui semblent trouver le bon équilibre !

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