Dans mon article consacré à la TNA/Impact Wrestling, je racontais que j’avais découvert cette compagnie en cherchant ce qu’était devenu Goldust. Je l’avais d’abord retrouvé à la WWE quand je m’étais remis au catch en 2002, alors qu’il venait juste de revenir de la défunte WCW, mais il est finalement reparti fin 2003. Or quand j’ai commencé à suivre la TNA au printemps 2005 (je crois), même si j’ai vu quelques pay-per-view rétrospectivement, c’était un peu trop tard puisqu’il venait de quitter la compagnie… avant d’y revenir en 2007. Le bougre a en effet beaucoup bougé, puisqu’il vient de terminer son cinquième (!) run à la WWE pour rejoindre l’AEW de son frangin ! Et s’il m’a beaucoup marqué, c’est qu’il a sans doute été le premier catcheur dont je suis devenu fan, ayant assisté à ses débuts. Une découverte tardive, donc, mais avant que Nulle par ailleurs ne démocratise l’esprit Canal au milieu des années 1990 justement, beaucoup de gens (dont ma famille) avaient tendance à oublier que la chaîne avait des programmes en clair. Donc jusque-là, ma perception du catch se limitait aux pubs pour les jeux dans les magazines, et surtout à mes séjours au Royaume-Uni puisque la discipline y était bien plus populaire. Je me souviens y être resté bloqué sur un PLV d’Ultimate Warrior, catcheur certes médiocre mais qui ressemblait à un Maître de l’univers en vrai.
Donc même si je me souviens que j’avais tendance à oublier de regarder certaines semaines, j’ai commencé à suivre (brièvement) la WWF vers 1995 – il se peut que la diffusion ait eu un retard de quelques semaines en France. Plusieurs catcheurs m’avaient alors marqué, en particulier le Japonais Hakushi, le Britannique British Bulldog, le Canadien Bret Hart, et aussi l’Undertaker qui, à l’époque, portait un masque façon Fantôme de l’Opéra – ce qui n’a pas dû durer longtemps puisque je n’ai jamais revu d’images de cette version depuis… J’aurais pu sans doute devenir fan si j’avais assisté à certains moments spectaculaires de sa carrière, mais le hasard a fait que ça n’a pas été le cas. En revanche, je me souviens des premières vignettes mystérieuses de Goldust. Son costume est censé parodier la statuette des Oscars mais, avec sa perruque, son profil grec (nez dans le prolongement du front) et sa manière de soulever un côté de sa lèvre à la Elvis Presley, on aurait dit un méchant de Ken le Survivant. Après plusieurs semaines de teasing, il est finalement arrivé sur le ring sous une pluie d’or, ce qui avait (à l’époque) sacrément de la gueule. J’ai sans doute raté ses premiers matches en pay-per-view, mais je me souviens très bien de sa première grosse rivalité avec Razor Ramon.
Il est clair qu’un tel gimmick serait jugé offensant aujourd’hui et, du reste, il a évolué par la suite pour devenir seulement excentrique, mais hélas plus bouffon qu’autre chose. Mais si j’étais certes moins ouvert d’esprit adolescent, je ne pense pas l’avoir perçu comme homophobe à l’époque ; c’était presque même le contraire. Je ne détestais pas forcément Razor Ramon, mais je ne m’identifiais clairement pas à cette caricature de mâle viril au torse poilu et je n’avais pas pleinement conscience du concept de heel/babyface. Et voir Goldust, que je ne percevais pas initialement comme « méchant », mettre Ramon mal à l’aise en le pelotant ou en se caressant après s’être pris une fessée avait plutôt quelque chose de jubilatoire. Cependant, bien qu’il soit originaire d’Austin, une ville justement réputée pour son goût pour le bizarre, Dustin Runnels n’avait pas choisi ce gimmick. Vince McMahon lui a proposé et il a accepté (sans chercher à comprendre ce que voulait dire « androgyne ») parce qu’il souhaitait surtout se différencier de son père Dusty Rhodes – qui a pourtant (involontairement ?) porté des tenues bien queer dans sa prime jeunesse… Ce serait donc, suivant une opinion répandue, l’un des rares exemples de gimmicks à avoir réussi (et marqué) sans vraiment correspondre à la personnalité de son interprète. À moins que, dans son cas, ce soit inconscient ?
Mais bien qu’il soit encore populaire aujourd’hui, comme je l’ai expliqué, son gimmick est vite devenu politiquement correct. Seuls certains gestes sont restés (la grande prise de respiration avant de chuchoter son nom) et des attaques moins orthodoxes comme le coup de cul en sautant. Cela dit, des catcheurs comme Velveteen Dream (ou même Shinsuke Nakamura) prouvent que l’on peut encore avoir des personnages extravagants, omoshiroi comme disent les Japonais – Velveteen Dream étant presque tout droit sorti de JoJo’s Bizarre Adventure, lui – sans pour autant être de mauvais goût. Et pourtant, quand on a vu les premières vignettes de Velveteen avec sa silhouette sur fond rose-violet, il y avait vraiment de quoi s’inquiéter…