Souvenirs : Fichiers cachés (1989)

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Emmanuelle (1989, Atari ST)Hormis quelques jeux électroniques, la première machine de jeu que j’ai eue à la maison était donc l’Atari ST que mon grand frère avait reçu pour son anniversaire en 1987, avec le portage de Double Dragon. Or le fait qu’il s’agisse d’un micro-ordinateur et non d’une console impliquait pas mal de prudence, même si nous avons eu la chance de ne pas débuter avec une machine utilisant des cassettes et autres joyeusetés. Si je nous revoyais à l’époque, je serais sans doute très gêné par toutes les précautions et superstitions que l’on avait à l’époque, parce qu’il y avait des manipulations que l’on faisait sans vraiment les comprendre – à la manière des possesseurs d’Amstrad CPC qui tapaient « ùCPM » pour lancer certains jeux au lieu de « run″[nom du jeu] » sans trop savoir pourquoi… Et comme la majorité des jeux étaient des copies, nous n’avions pas de manuel et il fallait que l’ami qui nous les avait passés note parfois sur les étiquettes des disquettes la marche à suivre. Typiquement, si la plupart des jeux s’exécutaient automatiquement, certaines disquettes pirates compilaient plusieurs jeux. Or, alors qu’il aurait suffi de démarrer l’ordinateur sans disquette pour arriver sur le bureau et choisir le jeu à lancer, on s’entêtait à utiliser une disquette spécifique contenant un programme qui ne s’exécutait pas automatiquement…

Ce rituel étrange avait d’autant plus quelque chose de magique que certaines disquettes révélaient ainsi un contenu caché. En effet, si certaines d’entre elles nous faisaient arriver au bureau, d’autres lançaient automatiquement un jeu ; il fallait donc forcer le passage par le bureau pour découvrir parfois d’autres jeux  disponibles sur la disquette ! Pengy faisait ainsi partie d’une demi-douzaine de jeux modestes mais bien sympathiques réunis sans menu sur une même disquette, et je crois bien qu’il fallait aussi passer par le bureau pour pouvoir lancer le sulfureux Emmanuelle (1989)… Forcément, la manipulation ajoutait à l’interdit de jouer à un titre clairement destiné à un public adulte même si, pour être clair, ce point and click est loin d’être torride. Librement inspiré par le livre érotique éponyme, il nous met dans la peau d’un type en quête de la fameuse Emmanuelle au Brésil, mais qui doit au préalable augmenter son potentiel érotique en multipliant les conquêtes et en trouvant des statuettes. Mais honnêtement, nous n’avions pas compris grand-chose et il y a visiblement plusieurs lieux (casino, cascade, etc.) que je ne me souviens même pas avoir vus. Le plus loin qu’on ait été est, il me semble, d’avoir combattu un rival sur la plage lors d’un mini-jeu, ce qui permet en cas de succès de débloquer la scène cinématique ci-dessous… Cela reste donc franchement soft.

Même en mouvement ce n'est pas follement torride...

Même en mouvement ce n’est pas follement torride…

Mais à vrai dire, j’ai surtout le souvenir d’être resté bloqué des heures à l’hôtel, demandant en vain à des gens s’ils avaient vu Emmanuelle. L’une des features les plus amusantes du jeu était cependant de regarder par le trou de la serrure des chambres ; on pouvait assister avec de la chance à un strip-tease d’Emmanuelle, mais le plus souvent on tombait sur un vieux en train de se laver les pieds… Et d’une certaine manière, il faut avouer que le jeu retranscrit assez bien la frustration de celui qui cherche le plaisir facile et immédiat – comme dans le méconnu Edmond (2006) de Stuart Gordon. Mais ma plus grande surprise concernant ce jeu est d’avoir découvert, des années plus tard, qu’il avait été conçu et co-écrit par une femme, Muriel Tramis. Et non seulement elle fut l’une des rares créatrices de jeu vidéo en France, mais son premier titre, Mewilo (1987), est à la fois le premier point & click de l’éditeur Coktel Vision, et aussi le premier jeu basé sur la culture antillaise, Tramis étant originaire de la Martinique. Elle a d’ailleurs lancé le mois dernier une campagne Ulule pour en produire un remake mais, à trois jours de la fin, l’objectif a hélas peu de chances d’être atteint. Ce qui ne signifie pas pour autant que le projet n’aboutira pas ; c’était de toute façon difficile de passer après beaucoup d’autres créateurs, parfois plus célèbres, et qui ont soit échoué soit déçu les attentes…

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