Auteur : Guillaume Verdin

Le son qui venait des chiottes

Concert de New Order au Ukrainian National Home de New York, le 18 November 1981

Ceux qui me connaissent savent que, musicalement, je ne jure (quasiment) que par New Order, et ceux qui me lisent régulièrement doivent également l’avoir remarqué même si je n’ai jusqu’ici publié qu’un seul article véritablement consacré au groupe, à l’occasion de la sortie de leur nouvel album en 2015 – toujours le dernier en date. Et comme je suis encore convaincu qu’il n’y a rien de plus subjectif que la musique et que tout ce que je peux raconter ne vous fera pas changer d’avis sur eux, cela faisait longtemps que j’hésitais à publier ce texte sur les particularités du son de New Order. Car même s’il y en a probablement beaucoup d’autres dans l’Histoire de la musique, ne connaissant hélas pas grand-chose à part cela, c’est pour moi le seul exemple de groupe dont le style suit un concept simple à expliquer et dont la genèse est connue. Cela dit, toutes leurs chansons ne le suivent pas, et on peut même dire qu’ils s’en sont pas mal éloignés depuis leurs débuts, bien que ce soit également parce que le genre s’est démocratisé au point de devenir assez anodin. Et puis ce ne sont pas vraiment des théoriciens et, comme bien souvent, beaucoup de leurs inventions ou particularités sont plus ou moins accidentelles ou bien nées de contraintes bassement techniques.

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Canadian Psycho

The Mask (1961)

The Mask (1961)J’expliquais la dernière fois que September Storm (1960) était le seul film américain en 3D sorti entre la première vague du début des années 1950 et la vaguelette Space-Vision du milieu des années 1960 (qui préfigure la deuxième vague des années 1980), mais cela ne veut pas dire qu’il n’y en ait pas eu dans d’autres pays – comme vous êtes naïfs ! The Mask (1961) est d’ailleurs carrément le tout premier long-métrage d’horreur canadien et, s’il n’entretient aucun rapport direct avec le film qui a révélé Jim Carrey (qui est canadien cela dit), il y a tout de même quelques similarités troublantes… Ayant débuté sa carrière dans la publicité, le documentaire et même le film de propagande pour l’effort de guerre (y compris sous la forme d’une comédie musicale !), Julian Roffman a toutefois été blacklisté aux États-Unis dans les années 1950 pour avoir écrit des critiques dans un magazine communiste durant sa jeunesse. De retour au Canada, il a quasiment recréé à lui seule l’industrie cinématographique locale, alors assez inexistante depuis l’époque du muet. Sa première tentative au titre là aussi étrangement prémonitoire, The Bloody Brood (1959), sera toutefois un échec mais pas la seconde. Roffman était fier de The Mask et en particulier de la 3D, mais il aurait aimé rester dans les mémoires pour d’autres films. Il a hélas refusé par la suite des propositions de films d’horreur, et n’a pas tellement réussi à monter de projets plus personnels…

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Invasion, ivre de films de série B

Invasion (2005)

Mon deuxième film de fin d’année demeure assez clairement mon préféré. Si son tournage n’a pas été sans heurt – quel tournage l’est ? – mais j’y reviendrai, Invasion est celui dont le résultat colle le plus à mon intention, et peut-être celui qui a le mieux vieilli. Il faut dire qu’il a été en général bien accueilli alors que, de mon point de vue, ça semble un peu paradoxal parce qu’il aborde un sujet très personnel… Disons que, ce que moi et quelques autres prendront pour une dénonciation déguisée, la plupart des gens y verront un concept grotesque mais qui rend le film d’autant plus amusant, j’imagine. Car aussi fantastique et parodique soit le résultat, il est en réalité inspiré par des expériences vécues ! Mais si Invasion m’est si personnel, c’est aussi que, davantage encore que dans Théo 7, j’en ai profité pour mettre un peu tout ce que j’aime, en suivant avant tout le canevas d’un des films qui ont eu le plus gros impact sur moi, Invasion of the Body Snatchers (1978), le deuxième du nom.

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Le Petit Bleu

September Storm (1960)

September Storm (1960)La plupart des films en 3D que j’ai abordés ici depuis le printemps ont bien souvent été projetés en 2D du fait de leur sortie tardive… Mais on franchit un cap supplémentaire avec September Storm (1960) qui a la particularité d’avoir été le seul film américain en 3D entre la première vague, qui s’est achevée avec La Revanche de la créature (1955), et la vaguelette qui débute en 1966 avec The Bubble, premier film exploitant la technologie Space-Vision. Plus économique, elle permet désormais d’enregistrer les deux yeux sur la même pellicule, l’un au-dessus de l’autre. Mais ce n’est pas le cas ici, et on retrouve d’ailleurs l’entracte permettant de synchroniser les deux projecteurs… Il s’agit donc d’une petite curiosité, mais rien de plus d’autant que le film tente de cumuler la 3D avec le format Cinemascope qui l’a tuée, or le recadrage n’est pas toujours très heureux… Peut-être que le réalisateur Byron Haskin avait des regrets de ne pas avoir participé à la première vague avec La Guerre des mondes (1953), son film le plus connu. Il y avait en plus un vrai potentiel avec W.R. Burnett (Quand la ville dort) au scénario, et les fonds marins sont parfaits pour la 3D – et puis cette fois c’est en couleurs, pas comme L’Étrange créature du lac noir (1954). Hélas, ce film d’aventure préfigurant James Bond n’est pas palpitant, sans doute par manque de budget.

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Théo 7 – Nostalgie des années 1980

Théo 7 (2004)

Comme je l’expliquais dans mon article introductif, tous les étudiants en réalisation à l’EICAR pouvaient créer un court-métrage en fin d’année, même si les moyens étaient limités. Au moins tout le monde était sur un pied d’égalité il me semble, car c’était en deuxième année que les auteurs des films primés l’année précédente gagnaient l’accès à la pellicule… Si ce n’est que pour être primé, il fallait déjà avoir été sélectionné pour la projection de fin d’année, et on va dire par euphémisme que mon prof principal menait largement les débats. Et pourtant je n’avais pas choisi la facilité pour mon premier court-métrage. Il faut dire que j’en avais eu l’idée bien avant de connaître les moyens mis à disposition, durant mon année sabbatique entre mon école d’ingénieur et l’EICAR. N’ayant jamais été à l’aise avec le format court, j’avais donc réfléchi à plusieurs idées, et Théo 7 me semblait la plus porteuse. Et déjà je m’orientais vers l’onirisme, m’inspirant de rêves que j’ai pu faire de jouets ou de consoles qui n’étaient pas vraiment comme dans la réalité… Je crois que c’était aussi parti d’un délire avec un ami où l’on avait imaginé un ordinateur parlant et un peu trop conscient. Autre signe du destin, le titre du film est un jeu de mots avec le micro-ordinateur TO7 de 1982, et je n’avais alors pas la moindre idée que j’allais rejoindre l’association MO5.COM quelques années plus tard !

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Good Old Movie

Gog (1954)

Gog (1954)Si je n’en avais jamais entendu parler, c’était déjà le cas des précédents films abordés mais je dois admettre que j’étais très sceptique vis-à-vis de ce film de science-fiction, influencé par son titre plus préhistorique qu’autre chose, et la jaquette du Blu-ray (différente de l’affiche ci-contre) n’inspirait pas plus la confiance… Et pourtant, c’est non seulement une excellente surprise mais le film a même été très bien accueilli par la critique à l’époque bien que, en dehors des projections presse et de cinq salles de Californie, il ait été diffusé en 2D du fait de sa sortie tardive, début juin 1954. Gog est en fait le troisième film d’une trilogie conçue par le producteur Ivan Tors, qui mettait un point d’honneur à proposer de la science-fiction non violente (en tout cas non graphique) et documentée. Ainsi, certains concepts scientifiques y apparaissent pour la première fois, comme l’idée de stase pour le voyage spatial qui inspire la séquence d’ouverture ; des scientifiques commencent par geler puis dégeler un mignon petit singe mais, par la suite, deux d’entre eux trouveront la mort, l’un après l’autre, alors que la porte de la salle se referme derrière eux et que la température se met à baisser toute seule… Donc s’il n’y a aucune goutte de sang, il y a tout de même des morts bien atroces et on imaginerait facilement un remake gore. C’est finalement le robot éponyme qui est bien trop ridicule pour faire peur même si cela le rendrait d’autant plus terrifiant dans la réalité. D’ailleurs, le film aurait influencé le roman La Variété Andromède (1969) de Michael Crichton, adapté au cinéma en 1971 par Robert Wise.

 

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L’exercice a été profitable

Qui a peur de Virginia Woolf... dans le parking ?

Cela faisait longtemps que je souhaitais mettre en ligne mes courts-métrages, jusqu’ici uniquement disponibles sur Facebook mais dans une qualité moindre, bien qu’ils aient tous été tournés en définition standard ; j’ai été diplômé de l’EICAR en 2006, au moment où la HD commençait juste à se démocratiser dans la prise de vue – l’un des nombreux mauvais timings qui ont émaillé ma « carrière »… Ces films eux-mêmes n’ont du reste pas toujours été faits au « bon » moment. Il faut préciser en préambule que cette école d’audiovisuel est l’une des rares, peut-être même la seule, à permettre à tous les étudiants en réalisation de tourner un film de fin d’année. S’il y avait également des sélections des meilleurs scénarios et des récompenses aux films primés lors des projections de fin d’année, c’était uniquement pour pouvoir tourner en pellicule, en général avec une équipe plus chevronnée. Or ça a souvent été mon souci ; comme j’étais toujours prêt avant les autres, je prenais les premiers créneaux de tournage dont personne ne voulait, et je me retrouvais à faire mes films précisément en même temps que ceux en pellicule qui mobilisaient du coup les meilleurs techniciens…

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Cinéma Bolsonaro

Jivaro/L’Appel de l’or (1954)

Jivaro/L’Appel de l’or (1954)Jivaro est en fait le second long-métrage en 3D d’Edward Ludwig après Sangaree (1953), un film en costumes sur la révolution américaine qui avait déjà pour vedette Fernando Lamas (le père de Lorenzo, et l’une des rares stars hispaniques de Hollywood il me semble) et qui était du coup le tout premier film en 3D de la Paramount. Lui aussi a été édité en Blu-ray chez Kino Lorber mais il est hélas introuvable ces temps-ci, ce qui est un peu dommage dans la mesure où un film d’aventure est quand même moins original en matière de stéréoscopie… En même temps, comme il est sorti à la fin de la première vague 3D, en février 1954, Jivaro n’avait jamais été projeté dans sa version originale à l’époque, lui (c’était même la première fois qu’un grand studio n’imposait plus la version 3D). Et c’est encore plus dommage car il en fait une utilisation assez judicieuse. À propos de Taza, fils de Cochise (1954), tourné entièrement en décors réels, j’avais expliqué qu’on pouvait difficilement tricher en 3D, mais Ludwig et son équipe y sont parvenus. Hormis quelques stock-shots en 2D de la forêt amazonienne (histoire de légitimer ce qui était affirmé dans le dossier de presse), la seconde équipe a tourné en Floride et le gros du film a été fait dans les studios de la Paramount, mais il faut vraiment se concentrer sur le fond de l’image dans certains plans pour entrapercevoir les murs peints, tant les décors sont vastes et incroyablement riches.

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Labyrainette

The Maze (1953)

Comme je menaçais de le faire dans mon précédent article, je me suis fait une commande de huit Blu-rays américains (dont sept en 3D) histoire de rentabiliser mon lecteur multi-zone. J’avais au préalable recensé un maximum de films disponibles sur Amazon.com et, parmi ceux qui étaient en stock, j’ai sélectionné ceux ayant des frais de port similaires (pour les mutualiser) puis j’ai éliminé les plus chers ; certains dépassent tout de même les $50… Je n’ai donc aucune comédie musicale pour le moment, ni l’unique (?) film de guerre en 3D, mais sept films allant de 1953 à 1984, sans western cette fois mais avec surtout de l’horreur et un zeste d’aventure. Il est aussi intéressant de noter que trois films n’appartiennent ni à la première vague des années 1950, ni à la deuxième des années 1980, mais nous y reviendrons, donc, le but étant de les traiter individuellement quitte à proposer des articles plus courts mais réguliers. Il faut dire que la plupart de ces Blu-rays sont édités par Kino Lorber, et ils proposent presque toujours des commentaires audio passionnants et parfois des courts-métrages en bonus, comme un dessin animé en 3D de Woody Woodpecker avec Wings of the Hawk (1953), que je n’avais hélas pas encore vu à la publication de mon article…

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Quatre westerns en région invalide

Metalstorm: The Destruction of Jared-Syn (1983)

Depuis mon précédent article, j’ai fait plusieurs découvertes surprenantes dont une le contredit en partie, puisque j’ai appris que le film Monster Hunter n’avait hélas pas été tourné en 3D, ce traître à la race binoculaire qu’est Paul W.S. Anderson s’étant même mis à la conversion depuis son précédent film, le dernier Resident Evil avant le futur reboot. C’est d’autant plus triste que même ses admirateurs estiment que son montage haché ne se prête pas du tout au procédé… Cela n’en reste pas moins ironique de la part de Sony qui produit ses films et avait sans doute fourni les rigs 3D pour ses tournages, mais on peut imaginer que ça les mettait mal à l’aise de publier un Blu-ray 3D que leur nouvelle console flambant neuve ne peut pas lire – et à ce sujet, j’ai aussi appris quelque chose d’édifiant, mais j’y reviendrai… Parce que, à la base, la découverte d’un western en 3D réalisé par Douglas Sirk m’a aussi bien inspiré l’article précédent que donné envie d’acheter quelques films en import. J’en avais au départ retenu cinq mais, pour économiser des frais de port, je suis parti sur quatre titres, deux westerns de la première vague 3D des années 1950 et deux séries Z post-apocalyptiques de la deuxième des années 1980, du même réalisateur en plus.

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